![Les faits s'étaient passés à la clinique Claude Bernard d'Ermont (Val-d'Oise) en octobre 2017.]()
Les faits s’étaient passés à la clinique Claude Bernard d’Ermont (Val-d’Oise) en octobre 2017. (©Illustration T.H.)
Une sortie alcoolisée et un trou de mémoire de plusieurs heures. Sur le banc des prévenus, Ilyasse D. assure ne se souvenir de rien de cette nuit du 15 au 16 octobre 2017.
L’homme de 30 ans avoue de simples flashes. Un membre de la Croix rouge croisé dans un bar parisien. Une pilule sortie d’une boîte jaune qu’il avale. Puis le néant.
Jugé, lundi 15 avril, devant le tribunal correctionnel de Pontoise pour avoir sexuellement agressé une patiente de 88 ans à la clinique Claude-Bernard, à Ermont (Val-d’Oise),e 16 octobre au petit matin, avant de s’attaquer à une seconde victime dans la foulée âgée de 91 ans, le prévenu a nié les faits se réfugiant derrière une improbable amnésie.
Ilyane s’est ainsi voulu catégorique : « Je n’ai pas pu commettre de tels actes, même si j’avoue que je peux être violent quand je bois. » « Sexuellement ? », rétorque la présidente, Dominique Andréassier. « Nous pas du tout. » Une défense qui n’a pas convaincu le tribunal qui l’a condamné à 5 ans de prison ferme.
Il se fait passer pour un médecin
Il est 6h31, le lundi 16 octobre 2017, lorsqu’un homme, « ayant des ressemblances frappantes avec le prévenu », souligne le procureur de la République, est filmé par les caméras de surveillance pénétrant dans la clinique après l’ouverture des portes au personnel.
Il se rend alors au service d’orthopédie, au quatrième étage, et entre dans la chambre de Denise, 88 ans, admise trois jours plus tôt afin d’être opérée après une lourde chute. Au chevet de la vieille dame, l’homme se présente comme un médecin et lui impose une pénétration digitale. Ce n’est qu’après son départ que l’octogénaire réalise qu’elle vient d’être victime d’une agression sexuelle.
Ma mère s’en rappelle bien mais elle ne veut pas en parler. Alors qu’elle ne s’était jamais enfermée chez elle, maintenant elle verrouille la porte de sa chambre à l’Ehpad, raconte l’une des filles de Denise à l’audience, sa mère n’ayant pas eu la force physique de se rendre au tribunal.
Elle revient sur une anecdote survenue deux ou trois jours après les faits. « Un jeune homme est venu pour l’aider à faire sa toilette, elle leur a fait un scandale, elle ne voulait pas qu’il le fasse. »
« Il a baissé mon slip et a tenté de mettre un doigt là où je pense »
Dans la foulée, l’agresseur s’ attaque de la même manière à une seconde patiente dans une chambre voisine.
Je venais à peine de m’endormir, lorsque j’ai été réveillée brutalement. Cette personne a baissé mon slip et a tenté de mettre un doigt là où je pense. Il n’a pas réussi, il a mis son doigt à la bouche et a retenté, sans réussir », a raconté Geneviève aux enquêteurs.
La femme de 91 ans se met à hurler. Alerté par les cris, un brancardier croise l’agresseur.
Il m’a regardé et m’a dit qu’il fallait qu’il rattrape son cousin avant de prendre les escaliers. Je suis allée voir la patiente qui m’a raconté ce qu’il s’était passé. »
Le membre du personnel se lance alors à la poursuite du suspect qui réussit à filer au volant d’une Volkswagen Golf dont la plaque d’immatriculation a pu être relevée. Le témoin a également indiqué que l’individu portait un gilet fluo siglé Flixbus, une société de transport.
Grâce à ces éléments, les enquêteurs de la sûreté départementale du Val-d’Oise ont réussi à identifier l’auteur présumé et à déterminer qu’il se trouvait à la clinique au moment des faits.
Outre les images filmées par les caméras de surveillance de l’établissement, son portable avait borné dans l’établissement médical.
« J’ai des principes et une morale »
Interpellé le 23 novembre, à sa descente d’avion alors qu’il revenait d’un voyage en Colombie, l’individu domicilié à Ermont et conducteur de bus travaillant pour plusieurs sociétés dont Flixbus, a toujours nié les accusations lors de ses auditions.
Je ne me suis jamais soustrait de mes responsabilités, j’ai des principes et une morale », lâche le prévenu.
Il évoque une consommation excessive d’alcool ce soir-là et cette pilule avalée qui l’aurait rendu malade et fait perdre la mémoire. L’expertise médicale n’a toutefois relevé aucune trace de drogue, tandis que les experts psychologues ont conclu que l’amnésie avancée par Ilyane ne peut être retenue, l’homme ne souffrant pas de syndrome confusionnel.
« Une amnésie invraisemblable »
« Une amnésie indéfendable et invraisemblable », tance, quant à lui, le procureur de la République qui souligne avec étonnement « j’ai rarement vu un innocent se défendre avec si peu d‘énergie, sur un ton presque atone ».
Pour le magistrat, la culpabilité du prévenu ne fait aucun doute. « Il y la voiture, le téléphone qui borne, même Monsieur D. reconnaît que l’homme filmé par les caméras de surveillance lui ressemble. » Relevant le côté « inquiétant d’une telle dénégation », il assure :
la vérité dramatique c’est que le prévenu est rentré dans deux chambres et a agressé de façon odieuse ces deux personnes très affaiblies avant de prendre la fuite après avoir été repéré ».
Le procureur a ainsi requis une peine de 5 ans de prison avec un maintien en détention.
Le tribunal ayant suivi ses réquisitions, Ilyane D. a été renvoyé en prison à la fin de l’audience. Il sera, par ailleurs, inscrit sur le fichier des délinquants sexuels.